Les conflits entre les personnes sont naturels et inévitables, dans la vie, au travail, à la maison et dans toutes nos relations avec les autres. Néanmoins, la plupart d’entre nous n’accepte pas vraiment ce fait et nous sommes toujours surpris et angoissés lorsqu’il est clair qu’un conflit au travail apparaît.
Il est facile d’être prévenant et respectueux des besoins d’une autre personne, tant qu’ils n’interfèrent pas avec les nôtres. L’émergence d’un conflit dans l’entreprise peut changer tout cela ; nous pouvons d’un seul coup nous sentir menacés, anxieux et en colère.
La même personne avec laquelle nous aimions travailler hier nous apparaît désormais comme un adversaire. Cela s’explique par nos expériences passées des conflits, dont la plupart ont été négatives.
Si nous avons une appréhension négative à l’égard des conflits, c’est avant tout parce que personne ne nous a appris à les gérer de manière constructive – et même, c’est l’inverse que nous avons vécu : l’issue de nos conflits a le plus souvent été destructive.
En tant qu’enfants, étudiants et employés (et trop souvent en tant que conjoints), nous avons fait l’expérience de perdre dans un conflit parce que les parents, les enseignants et les chefs ont utilisé leur pouvoir pour gagner à nos dépens.
Même si nous connaissons les sentiments de rancune, de colère, d’hostilité, voire de haine que nous éprouvons à la suite d’une défaite, la posture gagnant-perdant est profondément ancrée. Lorsque nous occupons des postes où nous avons du pouvoir sur les gens, nous choisissons souvent de gagner sur eux.
De nombreuses recherches montrent les effets néfastes de la résolution de conflits gagnant-perdant sur les relations interpersonnelles. Elle crée la distance, la séparation, l’aversion, voire la répugnance. C’est la principale raison pour laquelle les gens quittent leur emploi pour un autre ou pour laquelle les mariages se brisent.
Et si l’on considérait le conflit au travail comme constructif ?
La façon dont les conflits sont résolus est le facteur clé de toute relation. En fait, c’est le facteur le plus déterminant pour créer une relation saine ou malsaine, mutuellement satisfaisante ou insatisfaisante, amicale ou inamicale, profonde ou superficielle, intime ou froide.
Comme la plupart d’entre nous le savent, il existe une alternative à la posture « gagnant-perdant ». On l’appelle souvent « gagnant-gagnant » ou « sans perdant », car l’objectif est de trouver une solution au conflit qui réponde aux besoins des deux personnes.
Résoudre les conflits de cette manière nécessite trois attitudes et comportements importants :
1) Avoir conscience que le conflit en général offre l’occasion d’un changement constructif
2) Avoir la volonté de s’engager dans le processus de recherche mutuelle d’une solution qui répond aux besoins des deux personnes
3) Avoir les compétences en communication et en résolution de problèmes pour que cette méthode gagnant-gagnant fonctionne.
Trop souvent, les gens veulent résoudre les conflits de cette façon, mais ils ne sont pas vraiment disposés, au fond de leur cœur, à chercher une solution mutuellement acceptable ; ou bien ils n’ont pas les compétences nécessaires pour travailler ensemble à en trouver une. Dans ces contextes, la méthode gagnant-gagnant est vouée à l’échec.
« Continuons de parler »
Lorsque vous êtes en conflit avec une autre personne, vous en êtes généralement tous les deux conscients à un certain niveau. Il y a un sentiment de déséquilibre, de malaise, quelque chose ne va pas dans la relation. La communication entre vous peut changer, devenir superficielle ou laconique. Ou bien le silence s’installe.
Une fois que vous avez cette conscience d’être en conflit, ce que vous faites ensuite est essentiel.
Reconnaissez d’abord l’existence du conflit.
Très souvent, nous décidons de ne pas le reconnaître en espérant que le conflit disparaîtra d’une manière ou d’une autre ou se résoudra de lui-même. Cela se produit rarement.
Ce n’est que lorsque les conflits sont révélés au grand jour qu’ils ont une chance d’être traités efficacement.
Et comme je l’ai dit précédemment, la gestion efficace des conflits requiert des compétences – des compétences dont l’efficacité est prouvée, parfois comme par magie. Lorsque vous disposez de ces compétences, l’idée d’affronter des conflits avec d’autres personnes n’est pas aussi intimidante, et peut même devenir stimulante et énergisante : il existe très peu de problèmes insolubles pour lesquels il n’y a pas de solutions mutuellement acceptables.
Le dialogue est l’élément clé de la résolution constructive du conflit au travail.
Le dialogue se compose de deux compétences de communication très différentes, mais toutes deux essentielles : l’écoute active et l’affirmation de soi sans culpabilité.
Le dialogue doit être mutuel et engagé par les deux protagonistes qui persistent sans relâche… Lorsque deux personnes entrent dans cette démarche et dépassent leur peur de commencer, le pouvoir miraculeux du dialogue se libère.
Reuel Howe, The Miracle of Dialogue
On ne peut qu’insister sur l’importance d’écouter avec empathie les besoins, les sentiments et les croyances de l’autre personne. Cela signifie faire l’expérience de ce que l’on ressent à la place de l’autre personne à ce moment-là, puis lui renvoyer ce que l’on a entendu pour vérifier si l’on a bien compris. Cela peut s’avérer très difficile, surtout lorsque vous avez des points de vue ou des sentiments très opposés, mais c’est possible si vous avez vraiment l’intention de comprendre. Quelque chose d’étonnant se produit lorsque les gens se sentent compris et acceptés à un niveau profond. Très souvent, leur besoin de s’accrocher à la solution du conflit envisagée se dissipe. Et souvent, leurs fortes émotions s’apaisent.
L’autre élément essentiel du dialogue est l’affirmation non culpabilisante de soi. À votre tour de parler de vos besoins et de dévoiler vos sentiments sans blâmer l’autre personne. Idéalement, l’autre s’engagera à vous écouter avec empathie, à se mettre à votre place, à vivre votre réalité. Lorsque cela se produit, vous pouvez, à votre tour, ressentir une libération et être plus ouvert à la recherche d’une solution mutuellement satisfaisante. Une fois que les besoins fondamentaux de chaque personne sont clairement définis et compris, les autres étapes nécessaires à la recherche d’une solution peuvent être franchies dans un climat de considération et de respect mutuels.
Les expériences positives de résolution de conflit au travail comme celles-ci sont à la fois gratifiantes, réconfortantes, génératrices de confiance en soi et dans les autres.
Et c’est une excellente chose.
Traduit et adapté par Isabelle Frignet des Préaux
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